Dans deux arrêts rendus le 25 janvier, la CJUE a abordé des questions liées au droit des passagers de demander une indemnisation pour un long retard de vol. L’aspect inhabituel de ces deux cas est que dans aucun d’eux, les passagers n’ont réellement subi de retard, ayant décidé de renoncer au vol retardé. Sans surprise, la CJUE a décidé dans les deux affaires qu’ils ne pouvaient alors prétendre à une indemnisation au titre du règlement 261/2004.
C-474/22 – Laudamotion
Dans cette affaire, un passager, en prévision d’un retard qui l’aurait amené à ne pas se présenter au rendez-vous d’affaires pour lequel il devait voyager, a décidé de rester chez lui plutôt que de se rendre à l’aéroport. Son vol est arrivé à destination finale avec un retard de 3 heures 22 minutes.
La CJUE a souligné que la perte de temps que l’indemnisation vise à atténuer n’est « pas un préjudice résultant du retard » mais un inconvénient (paragraphe 27). Tous les passagers le vivent de la même manière, ce qui a permis d’uniformiser la mesure compensatoire. Cependant, contrairement aux vols annulés, en cas de retard de vol, pour pouvoir demander une indemnisation, les passagers doivent se présenter à l’enregistrement à l’aéroport (paragraphe 30). Dans ce cas, le passager n’avait alors pas droit à une indemnisation car il ne s’était pas présenté à l’enregistrement. La Cour a toutefois rappelé que le passager pouvait réclamer une indemnisation supplémentaire conformément à l’art. 12 Règlement 261/2004 pour les dommages individuels, par exemple résultant de l’absence d’une réunion de travail (paragraphes 32-33).
C-54/23 – Laudamotion et Ryanair
Ici, le passager a évité le retard de vol de 6 heures en réservant un vol alternatif, qui est arrivé à la destination finale avec un retard de moins de 3 heures.
La CJUE se concentre sur le fait que le passager n’a pas subi les inconvénients d’un long retard, ni de perte de temps, et n’a donc pas non plus droit à une indemnisation (paragraphe 22). La Cour note que le passager aurait pu subir un inconvénient puisqu’il a dû trouver lui-même un autre moyen de transport, mais cela ne constitue pas un inconvénient grave selon la Cour (para 23). Il convient de mentionner que dans ce cas également, le passager a bénéficié d’une certaine forme de réparation puisqu’il pouvait demander le remboursement du billet d’avion conformément à la législation nationale.
Les deux cas limitent alors l’application du règlement 261/2004, mais d’une manière cohérente avec l’objectif d’un niveau élevé de protection des passagers. Les passagers ne sont pas laissés sans recours pour réclamer une indemnisation pour les dommages individuels.