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Article tout frais : Critiquée, pourquoi la Cour de justice de la République se maintient ?

A nouveau, ce site va porter à votre connaissance un texte qui circule sur le web. La thématique est «la justice».

Le titre (Critiquée, pourquoi la Cour de justice de la République se maintient ?) est évocateur.

Identifié sous la signature «d’anonymat
», l’éditorialiste est positivement connu.

Si la cour de cassation n’en décide pas autrement, Eric Dupond-Moretti sera bien jugé devant la Cour de justice de la République (CJR). Dans quel délai ? Au mieux, selon les indications recueillies, durant le second semestre 2023. Et avant, en tout cas, que cette cour de justice ne soit éventuellement supprimée, ce que deux projets de loi, en 2013 et 2019, avaient envisagé, sans jamais aboutir. Une suppression qu’a également préconisée, en juillet, le rapport Sauvé à la suite des états généraux de la Justice.

Cette Cour de justice de la République, créée en 1993 alors que plusieurs ministres socialistes devaient être jugées dans l’affaire du sang contaminé, fait en effet l’objet de nombreuses critiques. Succédant à la Haute cour de justice de la République, la CJR est la seule juridiction habilitée à poursuivre et à condamner les membres du gouvernement (Premier ministre, ministres et secrétaires d’État) pour des crimes et délits commis dans l’exercice de leurs fonctions.

Peu de condamnations

Or, en presque trente ans d’existence, la lenteur et la clémence de ses arrêts ont souvent été décriées : huit ministres et deux secrétaires d’État ont fait l’objet d’une condamnation mais en étant parfois dispensés de peine : ce fut le cas, par exemple de l’ex-ministre de l’Economie, Christine Lagarde, poursuivie pour abus d’autorité dans l’arbitrage favorable à Bernard Tapie (annulé depuis).

La composition de la CJR, au moment du jugement, soulève également des interrogations : trois magistrats et douze parlementaires (six députés et six sénateurs) siègent. Il en résulte une sorte de bienveillance, d’identification. Ces ministres sont souvent jugés pour des faits liés à la manière dont ils ont exercé leur fonction. Il était reproché à Christine Lagarde, par exemple, de ne pas avoir engagé de recours contre la décision arbitrale (N.D.L.R. : en 2008, un tribunal arbitral avait octroyé 403 millions d’euros à l’homme d’affaires, dans le cadre du conflit l’opposant au Crédit Lyonnais au sujet de la vente d’Adidas). Or, ces juges parlementaires ne sont-ils pas tentés de se dire : Est-ce que j’aurais fait mieux à sa place ? Ou encore de se demander : Et si moi aussi, un jour, je suis ministre…, note Cécile Guérin-Bargues, professeure de droit public à l’Université Paris 2 Panthéon-Assas et autrice d’un livre sur la CJR (1).

Une révision constitutionnelle

Autre grief souvent formulé : la CJR ne peut juger que les ministres ou secrétaires d’État. Autrement dit, si pour une même affaire, d’autres personnes sont mises en cause (un directeur de cabinet, un proche…), ces dernières sont jugées dans le cadre d’une autre procédure, devant les tribunaux de droit commun. Cela peut parfois aboutir à des contradictions, d’autant que les ministres s’en sortent souvent mieux devant la CJR, note encore Cécile Guérin-Bargues.

Charles Pasqua, ancien ministre de l’Intérieur, avait ainsi été blanchi par la CJR du délit de corruption passive dans l’affaire de la vente du casino d’Annemasse (N.D.L.R. : il avait toutefois été condamné dans un autre volet de cette affaire), alors qu’un de ses proches avait, lui, été condamné pour corruption active.

Il s’agit d’une singularité française. Dans les pays anglo-saxons, les ministres sont jugés devant les tribunaux ordinaires. Et les peines peuvent être lourdes, rappelle Raphaël Piastra, maître de conférences en droit public à l’université Clermont-Auvergne.

Reste que malgré ces critiques, la Cour de justice de la République n’est sans doute pas près de disparaître. Celle-ci figure dans les articles 68-1 et 68-2 de la Constitution. Autrement dit, pour la supprimer, il faut une révision constitutionnelle. Soit en obtenant une forme de consensus à l’Assemblée nationale et au Sénat, ce qui dans le contexte actuel me paraît inenvisageable. Soit via un référendum. Mais cette procédure est politiquement risquée », précise Cécile Guérin-Bargues.

Est-ce pour autant inenvisageable? Raphaël Piastra ne le pense pas si le chef de l’Etat décide de reprendre son projet de réviser la Constitution de manière plus globale, à l’instar de son projet en 2019, qui prévoyait aussi de renforcer l’indépendance du parquet, de rénover le référendum d’initiative partagée… Dans ce cas, pourquoi pas…

Le prochain procès de la CJR est prévu les 19 et 20 octobre : l’ancien ministre aux Anciens combattants, Kader Arif, doit comparaître pour des soupçons de favoritisme autour d’un contrat.

(1) : « Juger les politiques ? La Cour de justice de la République », édition Dalloz.

 

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